La créativité

Objet de l’article

Vous trouverez dans cet article un bref développement sur la pensée créative, à quoi ça sert, comment la stimuler, la développer, la mettre en œuvre, partant du principe qu’elle peut être utile tant pour résoudre une énigme que pour sauver la vie !

Introduction

Inventer, imaginer, trouver des idées nouvelles, différentes, inédites… nous employons un vocabulaire étendu et diversifié pour parler de créativité et tenter de cerner ce  vaste univers.

  • Inventer parle d’un processus qui aboutit à un résultat concret : l’invention, physiquement identifiable, palpable.
  • Imaginer peut rester une forme mentale qui ne sortirait jamais de la tête de celui qui la produit. Cela consiste littéralement à se faire des images et tout le monde en a la capacité. Par exemple, et surtout à l’intention de ceux qui disent ou pensent ne pas parvenir à se créer des images dans la tête sur commande, pensez à la couleur des murs de votre chambre ou à la forme du pied de lampe que vous allumez quotidiennement au réveil ou au coucher, ou à tout objet familier que vous utilisez régulièrement (votre portefeuille, votre voiture, la porte de votre maison, etc.). Maintenant qu’il est évident que vous savez imaginer (vous venez de le faire… !), vous pouvez vous amuser à déformer ces objets, les agrandir deux fois, dix fois et ils se transforment en un autre objet, avec une autre fonction, tel le pied de lampe qui peut devenir un lampadaire. Imaginer maintenant que ce lampadaire, incluant toutes les caractéristiques de celui qui était sur votre table de nuit, est démultiplié et installé sur les trottoirs de la ville où vous vivez… original, non !

La déformation peut être inversée et vous allez dans la miniaturisation. Votre pied de lampe se transforme en un appareil de chirurgie qui permet d’explorer les réseaux de neurones, câbles, boyaux ou tuyauteries du cerveau si je puis me permettre ce catalogue d’images.

 

Vous avez tous compris que créer, penser créativement, sont le résultat de processus mentaux que nous utilisons inconsciemment et que nous pouvons donc formaliser pour qu’ils deviennent conscients et utilisables. L’être humain est fait ainsi que pour formaliser sa pensée, il a besoin d’élaborer des représentations (ou formes mentales ou imagerie mentale) afin de donner un sens à ses perceptions sensorielles et pouvoir en faire quelque chose à l’extérieur de lui, au minimum s’exprimer (imprimer à l’extérieur).

 

Ce que l’on nomme par le terme créativité désigne le plus souvent un ou des processus particuliers destinés à répondre à une situation précise dans un contexte spécifique. Il peut s’agir de résoudre un problème concret, de satisfaire un besoin, de se donner du choix, etc. Dans tous les cas, il est indispensable qu’il existe un résultat palpable à la fin d’un processus de créativité, une création concrète pour donner tout son sens à ce mot. Sans résultat tangible, visible, mesurable, la créativité n’est qu’un processus de pensée qui consiste à jouer avec ses représentations mentales en les transformant. Ce que nous transformons ainsi sont les formes représentées que nous avons de la réalité. Nous pouvons les combiner entre elles, les rapprocher de façon aléatoire, les transposer sans ménagement d’un univers à un autre… et bien d’autres choses encore que nous aborderons plus loin.

 

Tentons deux définitions

  • Créer est une démarche qui permet de trouver des solutions nouvelles, originales et inédites par rapport à une situation de départ, son contexte et son histoire et qui va se traduire par une formalisation physique de la chose créée pour pouvoir affirmer qu’il s’agit d’une création.
  • La pensée créative, c’est-à-dire le processus mis en œuvre pour trouver des idées, fait partie de la démarche qui aboutit à la création sans que cela se traduise par un résultat tangible si ce n’est la production de formes mentales, de mots, de dessins, d’écrits.

La pensée créative est donc la capacité à trouver des idées sans obligation de résultats formalisés.

Dans les deux cas la finalité est la même c’est-à-dire se donner de nouvelles options, ouvrir des perspectives là ou il n’y en avait pas ou plus. Il s’agit de sortir de l’enferment mental qui consiste à croire qu’il n’y a pas de solutions à un problème ou qu’il n’y a qu’une seule issue possible.

Le penseur créatif recherchera donc la profusion d’idées, développera un système de croyance basé sur « tout est possible » et sur la croyance qu’il y a toujours une autre façon de voir, de se représenter et d’aborder une situation.

Comment trouver de idées nouvelles ?… quelques points de repères !

Les processus de pensée que le créatif va utiliser vont de l’emprunt de solutions mises en œuvre par d’autres dans le même domaine ou dans des univers voisins, à l’élaboration d’inédits tant dans la forme, dans le résultat à atteindre, que dans la façon d’y parvenir.

Les modèles de pensées créatives peuvent se résumer, sans prétendre à l’exhaustivité, à 10 familles de processus.

 

Simplifier : Découpez le problème en petits éléments facile à résoudre et agglomérez les différentes solutions partielles pour construire les options de résultat.

L’un de mes enseignants nous rappelait souvent : « On n’avale pas le mammouth en une seule bouchée ! »

Evoquer : Exprimez et noter tout ce qui passe par la tête, évoqué par la situation de départ : les pistes de solutions, les mots utilisés pour exprimer le problème ou le besoin, les mimiques…

Utilisez tout média d’expression pour extérioriser tout ce que vous évoque le sujet de la recherche d’idées (peinture, musique, danse, expression corporelle, etc.)

Jouez sur les mots : leurs sonorités, leurs sens,…

« Rien n’est plus dangereux qu’une idée quand c’est la seule que vous avez » Emile CHARTIER

Explorer sensoriellement : Utilisez des sources de stimulations externes pour exciter votre cerveau (sons, musiques, images de magazines, senteurs, exercices physiques, toucher,…)

Changez les sous modalités sensorielles, visuelles, auditives, kinesthésiques, olfactives, gustatives, de vos représentations  (images mentales) de la situation de départ et des pistes de solutions éventuelles (changer les couleurs, l’éclairage, modifier le son, plus fort, plus faible, augmentez, diminuez la température,…)

Allez vous promener et utilisez tout ce que vous percevez sensoriellement pour suggérer des idées.

« Les Français ont une telle façon gourmande d’évoquer la bonne chair qu’elle leur permet de faire entre les repas des festins de paroles ». Pierre DANINOS

Emprunter :Recherchez comment d’autres s’y sont pris dans un contexte équivalent et copiez.

Réutilisez des solutions que vous avez trouvées dans le passé pour d’autres contextes.

« Dans la vie les jeux sont donnés, mais avec un jeu donné, chacun peu faire une partie différente ». GOETHE

Faire comme si : Imaginez les différentes possibilités de résultat idéal et faire comme si c’était acquis.

Faites comme si vous êtes une autre personne avec sa façon de penser et pensez comme elle (Einstein, Coluche, Tintin, votre héros de roman, de film, etc.) Que dit elle du problème et des solutions ?

Faites intervenir un magicien, faites comme s’il est à vos cotés et vous pouvez lui demander tout ce que vous voulez. Autorisez vous l’impensable, le « pas permis » !

Faites comme si le problème est la solution

« Les hasards ne servent que les esprits préparés ». PASTEUR

S’éloigner du cadre de référence : Utilisez le processus d’enchaînement d’idées. Les unes derrière les autres par association d’idées sur la forme, la couleur, le son, la fonction à l’infini, allez le plus loin possible jusqu’à ne plus être dans le cadre de référence de départ.

Recherchez des contextes ou la situation de référence est une solution.

Transportez vous dans d’autres univers, d’autres civilisations, dans un monde minéral, végétal, animal, et imaginez comment la situation serait traitée ?

Einstein et la théorie de la relativité !

Alors qu’il pensait à ses recherches sur les photons, il a eu l’idée géniale, en voyant un rayon de lumière de se dire… et si je chevauchais le rayon de lumière et que je devenais la lumière, je pourrais comprendre la notion de son déplacement par rapport au reste du monde…

Modifier les paramètres :(transformer, déformer)
Augmentez, diminuez les paramètres de la situation de référence.

Changez votre âge pour résoudre la situation (plus vieux, plus jeune)

Prenez le contre pied de tout, inverser les sens, les mots, etc.

« L’invention c’est 1% d’inspiration, 99% de transpiration ». Thomas EDISON

Combiner : Prenez plusieurs façons de résoudre la situation et faites les interagir entre elles.

Associez de façon forcée les résultats de la production d’idées.

Rapprochez de façon aléatoire et forcez des objets, formes, concepts qui n’ont rien de commun à priori avec le contexte ou avec la situation de départ ou avec les critères du résultat à atteindre.

« Les esprits sont comme les parachutes. Ils ne fonctionnent que quand ils sont ouverts ». Louis PAUWELS

Rêver :  Se racontez une histoire féerique.

Imaginez un scénario de film futuriste où tout se résout.

S’identifiez à la situation de départ et déformez la, sans réserve.

Laissez vous aller au délire verbal, intellectuel et mental.

« Si tu veux tracer droit ton sillon, accroche le à une étoile » Proverbe chinois

Dépasser les limites : Cherchez la limite de ce que l’on vous propose, des méthodes que vous utilisez, des concepts que l’on vous enseigne.

Critiquez, non pour juger mais pour trouver le cas où ce que l’on vous propose ne marche plus, ne s’applique pas et imaginez librement votre solution.

« La créativité est une stratégie pour satisfaire sa curiosité » Clément BOYÉ
A chaque auteur son modèle

Des auteurs comme Edouard DE BONO parlent de pensée latérale. Cela signifie que pour trouver une solution, une idée nouvelle par rapport à un cadre de référence, il est pertinent de sortir de ce cadre pour chercher de nouvelles possibilités, nouvelles suggestions ou solutions déjà expérimentées par d’autres à l’extérieur du contexte de référence.

Par exemple : J’habite à Paris et mon bureau est trop petit pour mon activité professionnelle. Je peux le réaménager, louer un plus grand bureau, réduire mon activité, etc. Ces solutions peuvent êtres bonnes cependant je ne sors pas du champ sémantique et fonctionnel lié au contexte (bureau, activité). Je peux aussi élargir ma façon de penser et chercher latéralement toutes les évocations que l’un des termes de ma problématique me suggère. Par exemple, si je m’intéresse au mot bureau, je trouve d’autres termes comme local, immeuble, volume, lieu, espace, etc. Je peux d’ores et déjà rebondir sur l’un de ces termes. Prenons le mot espace, il peut s’agir d’un espace réel ou virtuel, concret ou abstrait et ainsi, je peux envisager qu’une grande partie de ce qui encombre mon bureau aujourd’hui peut être transformé en données numérisées, stockées sur un disque dur d’ordinateur qui lui-même peut ne plus être physiquement dans les murs que j’occupe mais également sur un serveur extérieur. Prenons le mot lieu. Vous pouvez décliner ce mot en lieu physique à moi, à d’autres, avec d’autres, lieu autonome, auto financé par sa fonction de lieu, lieu virtuel et cela devient un site qui peut simuler la configuration d’une entreprise utilisant de grand volume (c’est le cas des magasins virtuels qui fleurissent sur internet) ou une opération immobilière de location de lieu dans lequel vous vous attribuerez la surface dont vous avez besoin, etc. à l’infini !

 

La pensée créative repose sur les principes fondateurs suivants :

  •  Un état d’esprit optimiste ou tout est possible tout le temps.
  • Des valeurs et une attitude d’ouverture, de curiosité, sans à priori, sans jugement, considérant que tout ce qui est pensé et exprimé est une forme basique derrière laquelle peut se cacher quelque chose de génial, comme par exemple la découverte du POST-IT, né d’essais ratés de colle indécollable !
  • Des principes de gestion de sa pensée : la production d’idées est volontairement et délibérément la plus profuse possible, la quantité primant sur la qualité et pour cela les créatifs séparent le temps de production et d’expression d’idées du temps du tri et évaluation des idées à retenir.
  • Une démarche par objectif précis, critérié et volontairement constructif et valorisant pour soi et son environnement. Pour augmenter l’efficacité d’une recherche d’idées, il est important en préalable de savoir ce que l’on veut obtenir à la sortie. Cela permet de fixer un cadre de contrainte relativement rigide et de créer une représentation, même si c’est pour mieux s’en éloigner. L’un des paradoxes de la démarche créative est que plus l’on fixe à priori le résultat que l’on veut obtenir, en acceptant d’explorer le plus librement possible hors de ce cadre et en séparant les phases de production et de tri, plus l’on va trouver de solutions inédites par rapport à ce cadre.
  • Une façon de vivre sa relation à l’environnement. La créativité demande d’être en alerte permanente, les idées nouvelles surgissent en effet à tout moment et souvent dans des moments et des lieux insoupçonnables ! Beaucoup vous diront que c’est sous leur douche du matin qu’ils ont trouvé l’idée qui a révolutionné leur vie. Pour d’autres, ce peut être dans des endroits plus intimes que la décence ne me permet pas de citer ou au cours de leurs rêves de la nuit que s’est élaborée l’idée, le concept nouveau. DESCARTES par exemple, qui a rêvé le discours sur la méthode, devenu la base de la pensée cartésienne !
  • La ténacité. Thomas EDISON rétorquait à ses détracteurs qui lui faisaient remarquer qu’il avait du faire beaucoup d’essai infructueux pour arriver à trouver la lampe à incandescence, qu’il avait trouvé 188 façons de ne pas trouver la solution.

 

Conclusion

La créativité, devenir ou être créatif relève de l’entraînement sportif de chaque instant. Cependant cet entraînement a besoin de répondre à quelques critères pour assurer sa longévité :

  • Faire cela en s’amusant, en faire un jeu avec sa pensée et les opportunités que la vie vous donne à voir, à percevoir
  • Faire cela comme si vous chiniez un objet insolite dans une brocante
  • Faire cela avec le regard, les gestes et l’excitation du petit enfant qui découvre le monde
  • Faire cela sans enjeu, sans chercher de résultat à priori comme l’oiseau qui chaque jour cherche sa nourriture sans ce dire aujourd’hui c’est un lombric bien gras de 10 cm de long que je veux mettre dans le bec. Il cherche globalement et prend ce qu’il trouve et en fait quelque chose.
  • Faire cela pour le faire, pour entretenir votre cerveau, ce formidable organe à produire des pensées, en état de fonctionnement optimal.

 

Enfin, vous voulez contribuer à votre santé, augmenter vos chance de longévité, vieillir en forme, développer ses capacités à trouver des idées nouvelles pour que cela devienne aussi naturel que de respirer, c’est non seulement possible mais je dirai même vital. Le développement de ce thème de recherche qui m’est cher, c’est-à-dire les liens et les relations étroites entre la physiologie et la démarche créative comme attitude de vie, me demanderait d’écrire plusieurs tomes en guise de conclusion.

 

Je me contenterai donc ici d’ouvrir une piste… à vous de l’explorer !